30 Avril 2011
Aragon dit un jour : « Rien n’est jamais acquis à l’homme, ni sa force, ni sa faiblesse, et quand il croit serrer son bonheur, il le broie. Sa vie est un étrange et douloureux divorce. » A bien y réfléchir, on ne trouve guère de logique à ces successions de joie et de tristesse qui secouent notre existence, à ces rythmes qu’impose tout ce qui nous entoure, à ces désirs qui nous animent et qui soudainement s’évaporent une fois satisfaits, ou alors qui nous rongent lorsque leur objet est inatteignable. Il serait pourtant si simple que de ne pas vouloir ce qui définitivement nous échappe. Et pourtant, on s’y colle, inlassablement. Et l’on y croit, ou à tout le moins on le fait croire. Voilà donc une comédie que l’on joue à soi-même, mais aussi pour les autres, parfois contre eux. Schopenhauer ne disait-il pas que la vie est une comédie, seule la mort une tragédie…Calderon de la Barca, auteur et poète dramatique espagnol du XVIIème siècle, préfère lui penser la vie comme un songe. Théâtralité, mise en scène, songerie, ou rêverie, l’existence est avant tout insaisissable. Elle est peut-être un rôle joué, mais alors sans metteur en scène autre que soi. Elle est peut-être une pièce de théâtre, mais alors sans scénario autre que celui dont l’écriture n’appartient qu’à soi. Mais écrire quoi ? N’est-ce pas aussi que s’illusionner dans cet écrit ? Pascal amer prévient : « La vie humaine n’est qu’une illusion perpétuelle. On ne fait que s’entre-tromper et s’entre-flotter. » Vive la comédie, et que chacun entre dans la ronde ! Cependant, une position est moins enviable que celle d’acteur de sa vie : en être spectateur. Quel gâchis que voici, car même s’il ne s’agit que de comédie, la vie n’en est pas moins à vivre, tout de suite, ici et maintenant. Il y a certes du confort à être dans l’assistance, mais rien de comparable à la joie que procure le jeu d’un beau rôle.