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Les chemins de la culture

Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous

De l'amour de soi à l'amour-propre selon Jean-Jacques Rousseau

« Il ne faut pas confondre l’amour-propre et l’amour de soi-même, deux passions très différentes par leur nature et par leurs effets. L’amour de soi-même est un sentiment naturel qui porte tout animal à veiller à sa propre conservation, et qui, dirigé dans l’homme par la raison et modifié par la pitié, produit l’humanité et la vertu. L’amour-propre n’est qu’un sentiment relatif, factice, et né dans la société, qui porte chaque individu à faire plus de cas de soi que de tout autre, qui inspire aux hommes tous les maux qu’ils se font mutuellement, et qui est la véritable source de l’honneur » (Discours sur l’origine de l’inégalité – Rousseau).


Amour-de-soi-amour-propre-rousseau.jpgJean-Jacques Rousseau distingue chez l’homme deux états, l’un naturel et qui concerne l’amour de soi, l’autre culturel à propos de l’amour-propre. L’amour de soi est une inclination de la nature visant la conservation et l’épanouissement de l’être. Rousseau voit également dans la pitié, qui est le refus de voir la souffrance d’autrui, un second trait caractéristique de la condition humaine. La raison serait ainsi exclue de ce qui permet de qualifier l’homme comme étant bon. L’homme se trouve plutôt contraint à ne pas agir exclusivement selon ses propres intérêts car un tel comportement serait attentatoire à autrui, ce que la pitié ne peut accepter. Il s’agit d’une bonté d’ordre naturel, qui participe de la conservation de soi : « L’amour de soi-même est toujours bon et toujours conforme à l’ordre. Chacun étant chargé spécialement de sa propre conservation, le premier et le plus important de ses soins est et doit être d’y veiller sans cesse, et comment y veillerait-il ainsi s’il n’y prenait le plus grand intérêt ? Il faut donc que nous nous aimions pour nous conserver, et par une suite immédiate du même sentiment nous aimons ce qui nous conserve. Tout enfant s’attache à sa nourrice ; Romulus devait s’attacher à la Louve qui l’avait allaité » (Emile –Jean-Jacques Rousseau).

L’amour de soi, en tant qu’affect primitif, est, selon Rousseau, universel. Aucun homme n’y échappe. L’homme est contraint d’assurer le propre soin de sa personne, il en va de sa survie. Toutes nos passions découlent ainsi de cette disposition et exigence naturelle, mais pas seulement. La culture s’en mêle. L’homme civilisé, en ne vivant pas seul, se trouve être en compétition avec son prochain, et une fois ses besoins primaires satisfaits, il se préoccupe bien plus d’être reconnu que de pitié. L’amour de soi, sous le coup de pressions culturelles, devient amour-propre. Le paraître se substitue désormais à l’être. L’homme dénaturé devient bientôt esclave du jugement des autres. Il est prêt à tout, à la haine, la vengeance. Ainsi, l’amour de soi est amoral car naturel, alors que la culture ne peut se passer de morale, sinon elle devient une barbarie civile par la confrontation des amours-propres.

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