23 Juillet 2011
L’interprétation est une médiation entre un objet dont la compréhension n’est pas immédiate et le sujet apte à comprendre. Le professeur de philosophie par exemple est un interprète lorsqu’il s’essaie à restituer à ses élèves le sens d’un texte de prime abord abscons. Le juge est également un interprète quand il fait appliquer la loi, c’est-à-dire faire d’une règle générale l’issue d’une problématique particulière. Le psychanalyste interprète aussi en signifiant à une conscience ce qui lui échappe, soit l’inconscient. L’acteur encore, s’interpose entre l’auteur et le spectateur, pour livrer une œuvre. Interpréter, c’est ainsi être initialement dans un entre-deux, entre une origine et une destination, et en interprétant on réalise le chemin qui va de la première à la seconde. Présenter de la sorte, l’interprète va chercher un sens pour le restituer ensuite. Cela suppose que ce sens soit préexistant à l’interprétation, et que le bon interprète est celui qui sera le plus fidèle dans sa restitution au sens originaire. Mais ne peut-on pas dire aussi qu’aucun sens n’existe en dehors de toute interprétation ? Que tout ce qui est sensé est interprétation ? Que le sens se construit avec et par l’interprétation ? Qu’en dehors de l’interprétation, point de sens, que de l’absurde ? Si tel est le cas, l’interprète est bien plus qu’un relais ; il est le maître. Il n’est pas seulement l’acteur ; il est aussi l’auteur. Il n’est pas seulement le psychanalyste ; il est aussi l’inconscient. Il n’est pas seulement le juge ; il est aussi la loi…Voilà peut-être une position quelque peu extrême car elle induit l’inexistence de toute référentiel, ce qui n’est pas vrai. Il y a bien le corpus qui participe de l’interprétation. Mais ce corpus est aussi le résultat d’interprétations antérieures à sa constitution, qui elles-mêmes sont le fruit d’interprétations...
Que l’interprétation soit une visée transcendantale ou une production immanente, l’homme interprète. Il lui faut donner du sens à tout ce qui est. C’est la condition de sa survie. On ne peut vivre continuellement dans l’absurde. Le sens sauve l’homme, avec l’interprétation pour le connaître ou le produire.