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Les chemins de la culture

Philosophie, économie, politique, littérature, la culture rendue accessible à tous

Spinoza contre Platon et Pascal...ou le bonheur tout de suite et non un pari

Spinoza-contre-Platon.jpgSpinoza écrivît dans Ethique que le philosophe est celui dont la « sagesse est une méditation non de la mort mais de la vie ». Le philosophe d’Amsterdam s’opposait ainsi à Platon, lequel considérait que philosopher, c’est apprendre à mourir. La philosophie doit-elle ainsi être une méditation sur la vie ou sur la mort ? Philosopher, est-ce se préparer à la mort ou apprendre à vivre ? Quel que soit la réponse, Platon et Spinoza se rejoignent dans ce qu’ils visent. Tous deux en effet pensent l’être, l’essence, le vrai, l’immuable. Leur différence se situe dans la façon de le penser. Platon est dualiste et selon lui, l’âme supplante le corps mais si elle lui est prisonnière. Philosopher, c’est se débarrasser des pressions corporelles qui détournent la pensée, pour atteindre la vérité. Le bonheur en quelque sorte est ailleurs, ce que ne croit pas Spinoza. C’est ici et maintenant que les choses se font et que les évènements se passent. Il s’agit de vivre tout de suite tout en sachant que l’homme est une partie finie d’une substance elle infinie. La mort d’ailleurs s’inscrit dans ce rapport entre la finitude humaine et l’infini de l’Univers. C’est de ce rapport que naissent les passions, entre joie et tristesse. La première est un accroissement de l’être, la seconde une diminution. Ainsi, on préfère aisément la joie mais si celle-ci n’est que passionnelle, elle disparaît aussi sûrement qu’elle nous touche. Une joie durable et solide se travaille, avec l’entendement et la philosophie. Philosopher, c’est avec la raison dépasser la passion pour la connaître et la vivre mieux. Philosopher avec Spinoza, c’est également comprendre que l’homme fait partie d’un tout éternel et que ce tout, sans lui, ne serait pas ce qu’il est. Avec Spinoza, on comprend que l’homme est un morceau d’éternité, éternité dont il peut avoir le sentiment, de son vivant, et non en direction d’un arrière-monde qui peut-être n’existe pas. Pascal pariait sur Dieu, Platon sur un monde des idées. Spinoza, lui, ne parie pas. Il joue le bonheur tout de suite.

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A
<br /> Fondamentalement spinoziste, je ne peux qu'affirmer de concert avec cet article la positivité et la "vitalité" de la philosophie de Spinoza. Néanmoins, plusieurs points méritent peut-être d'être<br /> précisés. Un des plus grands dangers de la philosophie est de trop généraliser, ce qui défigure parfois totalement les propos qu'on cherche à défendre. J'estime beaucoup la vulgarisation<br /> philosophique, mais je ne crois pas qu'elle doit pâtir nécessairement d'absence de précisions.<br /> <br /> La position que vous faites tenir à Platon me semble, par exemple, très grossière et schématique. Il faudrait peut être précisé que vous renvoyez essentiellement ici au dialogue du Phédon,<br /> sous-titré "De l'âme", et dont le contexte n'est pas négligeable : Socrate, condamné à boire la cigüe, est sur le point de mourir. Ses amis et disciples, effondrés par sa perte, lui propose de<br /> s'échapper. Il refuse et entame tout très beau dialogue pour leur expliquer pour quelles raisons métaphysiques il accepte le sort de sa condamnation. On ne peut ici négliger tout ce contexte,<br /> énormément mis en avant dans le discours, et qui permet de comprendre la position très dramatique que peut tenir ici Platon, et qui donnera lieu à l'assimilation du corps au "tombeau de l'âme",<br /> viciant l'âme aux basses choses. Mais il ne faut pas pour autant oublier que Platon est lui aussi, à sa manière, un philosophe de la vie. N'oublions pas que Socrate, bien que de nombreux mythes ont<br /> circulés sr lui, n'était pas un ascète, aimait la vie et la nourriture, et que sa philosophie n'a rien d'un nihilisme ou d'un pessimisme. Même dans la fin de la République ou même dans le Phédon,<br /> on ne trouve pas Platon affirmer qu'il ne lui tarde de mourir afin d'accéder au véritable bien. N'oublions pas non plus le très beau dialogue du Banquet, qui montre que la question est bien plus<br /> complexe quand il s'interroge sur la question de l'amour et des choses sensibles. On ne peut pas résumer si synthétiquement la position de Platon sans perdre de vue la philosophie de Platon. Même<br /> dans ses textes qu'on pourrait dire "d'épistémologie", comme le Gorgias ou le Ménon, Platon n'abandonne jamais la question de l'expérience sensible et du corps, qui a un statut bien plus complexe<br /> qu'on peut le croire. Je renvoie notamment aux travaux d'Olivier Renaut qui a cherché à développé, entre autres, ces questions du sensible dans la philosophie Platonicienne. Je finirai en répondant<br /> à vos propos : vous dites que "le bonheur en quelque sorte est ailleurs" chez Platon, contrairement à Spinoza. Evidemment, il y a une grande distinction en raison d'un système transcendant et un<br /> autre immanent entre leurs manières d'accéder à la vérité, et comme les deux sont rationalistes, ils pensent en effet que c'est par la vérité qu'on accède au Bien, et au bonheur (bien qu'il faille<br /> tout de même rappeler que la question de l'accès au bonheur est secondaire chez Platon, alors qu'elle est tout à fait première chez Spinoza). Néanmoins, je ne crois pas qu'on puisse penser que la<br /> transcendance des idées signifie la transcendance du bonheur que vous sous-entendez, car une telle position revient à penser ce que vous semblez dire en filigrane, à savoir que pour Platon, on ne<br /> peut accéder au bonheur dans cette vie, qu'il faut attendre de passer à un autre plan d'existence pour cela. Il me semble que c'est une erreur d'interprétation : si cette idée était celle de<br /> Platon, comment comprendre que dans l'allégorie de la caverne, l'homme qu'on libère et qui accède au véritable lieu des idées retournent ensuite dans la caverne? Je crois que si Platon tenait les<br /> propos que vous lui prêtez, il serait plus logique d'imaginer qu'en accédant aux idées vraies, l'homme ne fasse rien d'autre que se tailler les veines pour en finir avec cette forme d'existence.<br /> Bref je pense sincèrement que ce n'est pas tenable, pour bien d'autres raisons encore.<br /> <br /> Ensuite sur Spinoza, que dire? Spinoza est une philosophe systématique et il est donc très dur de synthétiser sa philosophie sans recourir à l'ensemble de sa doctrine. Mais je trouve que vous<br /> accumulez ici des éléments importants dans sa philosophie sans les rapporter réellement à votre objet, à savoir comment la philosophie spinoziste est une philosophie de vie. Il aurait été par<br /> exemple intéressant pour vous de revenir ici (j'ai vu que vous le faisiez dans un article ultérieur) sur le statut du suicide chez Spinoza, et le fait qu'il ne peut pas admettre un tel geste dans<br /> la logique de son système.<br /> <br /> Vous parlez des variations affectives, de la joie et de la tristesse, mais dans la cinquième partie de l'Ethique, Spinoza dit justement que le bonheur n'est pas la plus grande joie( "une plus ou<br /> moins grande perfection") mais la "perfection elle-même". Spinoza ne pense pas le bonheur sur le mode de la variation, et c'est pourquoi il faut tout de même s'interroger sur la forme que prend,<br /> dès lors, une telle béatitude. On ne peut nier que la béatitude spinoziste est éminemment liée au troisième genre de connaissance et donc à son système rationnel.<br /> <br /> Enfin dernier détail : s'il est vrai que l'homme peut faire l'expérience de son éternité, l'expression que vous employez selon laquelle l'homme serait un "morceau d'éternité" n'est pas correcte. Je<br /> vous renvoie notamment aux ouvrages de Chantal Jaquet qui a questionné ce point et qui a montré que l'éternité, de par son caractère indivisible, ne pouvait être morcelée. De plus, l'éternité dont<br /> l'homme fait l'expérience n'est pas autre chose que l'éternité divine : il n'y a pas deux formes d'éternité différentes, mais simplement une forme de "percevoir" et de "faire expérience" de cette<br /> éternité unique. En ce sens, nous sommes tout aussi éternels que Dieu (du moins, la partie de notre Esprit qui est éternelle, car seule la raison et la science intuitive sont éternelles dans<br /> l'homme, sont aussi éternels que Dieu).<br /> <br /> Voilà pour les quelques remarques que je souhaitais vous faire. Je pense que l'imprécision de votre article peut amener de mauvaises lectures des philosophies de Platon ou de Spinoza, et en tant<br /> qu'ami de Spinoza, je me suis senti votre obligé, en tombant sur votre article, de vous exprimer mon point de vue à son sujet. J'espère que vous n'en serez pas offensé, et que vous en tirerez toute<br /> la positivité et tous les conseils qui le motive et qui le gouverne.<br /> <br /> Bien à vous et bon courage pour la suite de votre Blog.<br /> <br /> Az'<br /> <br /> <br />
Répondre
J
<br /> <br /> merci beaucopu pour votre commentaire très intéressant.<br /> <br /> <br /> <br />