6 Juin 2010
L'apparence est une partie du monde telle qu'elle se livre à nos sens récepteurs. Pour autant, ce qui nous est donné est-il réel, ou correspond-il à tout le moins à la réalité ? Je pourrais très bien être fou et ainsi voir un loup près d'un bosquet, alors que d'autres n'y verraient qu'un chat hurlant. Ce qui est apparent n'est donc pas forcément vrai. Il faut procéder alors à un travail destiné à s'assurer de la conformité d'une apparence avec le réel. Mais cet effort ne peut-il ne pas être qu'une apparence de plus, compte tenu qu'il sera fourni par quelqu'un à qui le monde, comme tout à chacun, lui est apparent ? L'apparence serait ainsi à la fois une porte d'entrée et de sortie quant à interpréter le réel. Peut-on malgré tout dépasser ce que Nietzsche présentait comme un nouvel infini au sujet de la représentation ? Avant lui, Kant tenta une réponse en distinguant l'apparence du phénomène, lequel serait véritable en se donnant tel qu'il est, en dehors de toute interprétation. Pour le philosophe de Königsberg, le phénomène serait une apparence vraie, alors que l'apparence est trompeuse. Sauf que qu'est-ce qui fait qu'une apparence soit plus vraie qu'une autre dès lors qu'elle est irrémédiablement une réception par la sensibilité humaine ? Faut-il d'ailleurs séparer l'être du paraître ? Ne peut-on pas dire que ce qui est l'est du fait qu'il apparaît ? Sartre répondait : « L'apparence ne cache pas l'essence, elle la révèle : elle est l'essence » (L'être et le néant – Sartre).
On peut aussi considérer qu'il n'y a rien d'autre que l'apparence, et alors elle serait tout, elle serait « apparence pure et universelle » comme le propose Marcel Conche, car en qualité de tout, rien derrière elle ne se cache, et elle n'exclut ni rien ni personne. L'apparence justifie alors le relativisme, car si l'apparence est donné à tout le monde, chacun en fait ce qu'il veut ou ce qu'il peut.